Pour les Trou Gamerz, il y a trois dates à retenir dans l’année : le Summer Game Show au début de l’été, la Gamescom au milieu et le TGS pour l’automne. Pour moi, la rentrée est également une date importante dans mon agenda. Non, pas pour la rentrée des classes et la joie de voir les enfants en larmes abandonnés seuls devant la grille rouillée de l’école municipale Victor Hugo, pendant que les parents soufflent à l’idée de retrouver un semblant de vie humaine 8h par jour. Pour moi, c’est aussi le moment où mon banquier commence à prévoir ses appels et où je m’entraîne à taper les numéros de ma carte bancaire le plus rapidement possible. Pour moi, Septembre c’est la D23 !
Disney’s Bitch Club Resort
Vous n’avez pas raté 19 épisodes de Diablo, ce n’est pas non plus une vieille route départementale cheloue paumée dans le Larzac. La D23 c’est tout simplement la convention bisannuelle de la marque aux grandes oreilles : D pour Disney, 23 pour l’année de la création de ce qui deviendra la Walt Disney Company. C’est là-bas que sont dévoilés les futurs projets de ce petit artisan qui n’a jamais cédé aux sirènes du capitalisme : parcs d’attractions, séries, film, goodies et ce qui nous intéresse ici… jeux vidéo ! Et c’est donc au cours de l’édition 2022 qu’a été montré pour la première fois Disney Illusion Island.
Ce n’est un secret pour personne à la rédac, je suis littéralement la pute à Tonton Walt :
- Acheter régulièrement Picsou Magazine : Check
- Se payer chaque année un séjour beaucoup trop cher à Disneyland et cramer un SMIC en merchandising : Check
- Se ruer sur la moindre collab’ entre une marque de prêt à porter et la souris : Check
Alors forcément, le fan de World of Illusion que je suis ne pouvait pas rester de marbre face à cette annonce. Reprenant le design initié par Paul Rudish au début des années 2010, le Mickey qui nous est offert ici est plus espiègle, farceur et maladroit et peut-être plus conforme à l’original des années 30. Minnie se veut également plus affirmée, plus en phase avec ce que l’on peut attendre d’une Minnie un tant soit peu modernisée. Donald et Dingo, les deux derniers personnages jouables sont eux fidèles à leurs traits habituels, râleur et colérique pour l’un, gourmand et gentiment niais pour l’autre.
Si les quatre amis ont exactement les mêmes capacités, on peut saluer l’énorme travail effectué par l’équipe d’animation. Chaque protagoniste dispose de sa propre palette de mouvements, chaque pouvoir supplémentaire a quelques spécificités cosmétiques nous poussant à changer de personnage juste pour voir les différentes mimiques.
MICKEY 2D
Pour « dire les termes » comme disent ceux trop jeunes pour avoir touché un Castle of Illusion, c’est toute la technique et le travail artistique qui sont à saluer dans cet Illusion Island. Si les premiers trailers laissaient penser à une pâle copie de Rayman Origins/Legends, le titre trouve très rapidement son propre style à base de personnages très contrastés au milieu de décors somptueux déclinés dans différentes teintes pastel. Sans forcément être très nombreux, les différents environnements accordent énormément de place à l’imaginaire et se contentent en général de se laisser simplement suggérer.
Une forêt ne sera pas juste un lieu rempli d’arbres ou une ville un simple amas de béton et de buildings, la suggestion se fera plutôt dans la palette de couleur et les différents éléments interactifs ou les types de plateforme. Pour chipoter, on peut parfois pester sur un léger manque de visibilité dans certaines phases, les jeux de couleur ne permettant pas toujours de distinguer quid de la plate-forme ou de l’arrière-plan.
Le parti pris n’est pas forcément aisé à décrire à l’écrit, mais parvient totalement à charmer la rétine. Le tout est porté par une bande son majestueuse de David Housden. Plus habitué à des productions issues de jeux indés comme Thomas Was Alone ou Lost Words, le compositeur fait mouche sur chaque piste de cette bande son. À chaque fois, il parvient à retrouver les sonorités très Disney, qu’il s’agisse de références aux studios d’animation, aux jeux de l’ère 16 bits ou même à certaines œuvres de Pixar. On retrouve autant du Toy Story, du Mickey Mania que du Cendrillon ou La Petite Sirène là dedans.
Et le plus beau dans tout ça c’est que le jeu est parfaitement fluide. Jeu Switch aidant, on pouvait légitimement craindre un framerate parfois capricieux : que nenni. Alors OK Illusion Island n’est pas la claque technique du siècle, mais sa fluidité et les animations chiadées donnent parfois ce sentiment de virevoltage et de flow maîtrisé.
Approche-toi petit, écoute-moi gamin
Visuel mis à part, Illusion Island était perçu comme un plateformer lorgnant un peu trop du côté de chez Ubi et son héros sans bras. Alors que… ben pas tant que ça en fait. Bon, la majeure partie du jeu se résume finalement à sauter d’une plateforme à une autre mais dans sa structure, le titre de Dlala se réfère beaucoup plus aux plus classiques des Metroidvania dans sa structure : des biomes à parcourir, plusieurs chemins bloqués, « oh ça alors un pouvoir trop bien pour passer ce précipice beaucoup trop grand dans le biome des toilettes ! » Pour finir par un « Ça alors un boss heureusement sensible à ce nouveau pouvoir qui m’a été octroyé, ça tombe quand même super bien ! »
Disney oblige, le jeu est garanti 100% non violent, aucun combat, aucune mandale enchantée ou laser étoilé ici. Les combats se règlent tous par… ben ne se règlent pas en fait, car tout ou presque doit être esquivé. Même constat pour les boss, tout se joue à l’esquive et aux sauts bien timés. Si les premiers ennemis rencontrés se gèrent par un simple saut, il va falloir rapidement apprendre les timings d’attaque des différents gêneurs pour progresser dans les derniers tableaux. Heureusement, si le jeu est inattaquable dans un domaine, c’est bien son accessibilité.
Prévu pour être jouable par n’importe qui, le titre offre une palanquée d’options de personnalisation pour doser la difficulté. Rien qu’au choix du personnage, il est possible de choisir le nombre de « cœurs » de départ, allant de 1 à… totalement invulnérable. Les sauts dans le vide n’existant pas, même les phases les plus ardues peuvent devenir faisables pour un joueur totalement hermétique au genre. Et c’est là où se situe tout le sel d’Illusion Island : il s’agit clairement du meilleur Metroidvania pour débutant qui en plus se paye le luxe de ne pas être trop long ! Comptez six bonne heures pour la quête principal, une ou deux de plus pour tout les collectibles pas forcément interessant qui, et même si c’est le genre qui veut ça, vous forceront à faire quelques aller retour pas vraiment palpitant.
En reprenant les codes du genre, mais en les adaptant à un public jeune ou non gamer, Dlala offre un jeu simple sans être simpliste. Un produit parfaitement calibré pour son public sans prendre les non joueurs ou les plus petits pour des vaches à lait. Ce que j’appelle la formule « La Maison du style », titre sorti il y a quelques années sur DS : un jeu qui s’adresse à un public pas forcément joueur, mais qui ne le prend pas pour une bête pompe à fric sous prétexte de « jeu pour casual ».
Une politique bienvenue qui transparait dans l’excellent mode coop’ du jeu. On sent d’ailleurs que la boucle de gameplay a été pensée pour ce mode. Un saut un peu trop compliqué pour un des participants ? Si l’un des membres de l’équipe parvient à passer l’obstacle, une corde permettra de le hisser simplement. Le plus jeune de la bande a du mal à suivre le rythme ? Il suffit au meneur d’avancer un peu pour que le traînard soit transporté au niveau du groupe. Si It Takes Two avait su se hisser en porte étendard du jeu coop’, il n’était pas forcément accessible aux joueurs les moins aguerris. Sans atteindre ce niveau d’excellence, Illusion Island corrige au moins le tir sur ce point et peut se targuer d’être dans le haut du panier des jeux familiaux et du « daron gaming ».
On a aimé :
- La direction artistique
- L’accessibilité
- Des collectibles partout pour les fans…
On a moins aimé :
- …mais qui n’invitent pas forcément à la rejouabilité
- Le scénario quasi inexistant
- Le challenge un peu chiche pour les joueurs aguerris
Craquez vos PO si :
- Vous êtes un fan du Mickeyverse
- Vous cherchez un jeu accessible
- Vous cherchez un premier Metroidvania
Quittez la partie si :
- Vous êtes musophobe/anatidaephobe/cynophobe
- Vous cherchez un challenge
- Vous êtes une mauvaise personnes sans âme qui n’aime pas Disney !
Magique
Illusion Island n'est clairement pas le meilleur jeu Disney de tous les temps et ne fera pas oublier l'ère 16 bits, mais Dlala nous offre ici une partition sans fausse note avec un titre coloré, accessible et parfait pour le public visé. On peut, à la rigueur, pester contre un scénario un poil trop naïf ou un manque de rejouabilité certain, mais dans l'ensemble ce retour aux jeux vidéo pour Mickey et ses potes est une excellente surprise qu'on espère revoir plus souvent.