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[Test] Kunitsu-Gami: Path of the Goddess

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Je n’ai rien compris à la bande-annonce de Kunitsu-Gami: Path of the Goddess sortie l’an dernier mais est-ce vraiment important pour profiter du dernier-né de Capcom ?  Ces couleurs chatoyantes et psychédéliques teintées de japon féodal et de yokai ne pouvaient que m’attirer. Mais que vaut cette nouvelle IP mystérieuse de Capcom quelques mois après la sortie de Dragon’s Dogma 2 ?

Quand on s’appelle Capcom, on peut facilement se reposer sur les grosses licences et sortir trois remakes de Resident Evil ou Ace Attorney par épisode. Au cas où, Street Fighter 6 assure l’après-vente avec son immense communauté. C’est d’ailleurs lors du weekend du plus gros tournoi de jeux de baston, l’EVO, que Kunitsu-Gami: Path of the Goddess est sorti. Pourtant, l’éditeur ne réalise pas ici une sortie discrète, puisque la communication a été assez fournie depuis le premier trailer, à renfort de défis à réaliser par la communauté pour obtenir de nouveaux objets. Même si on sait que ces objets seront présents quoi qu’il arrive, c’est toujours sympa d’engager les joueurs avant la sortie du jeu. Et ces objets ne sont pas inutiles puisqu’on retrouve avec grand plaisir des artefacts du jeu Ōkami, jeu légendaire de Clover Studio (ex-PlatinumGames) sorti en 2006, avec un costume de la déesse Amaterasu pour le héros et d’autres accessoires et objets décoratifs. Quelques jours avant la sortie, on a même pu découvrir du bunraku, théâtre traditionnel de marionnettes, pour nous présenter le contexte du jeu.

La miko danse

Yoshiro est la chamane à escorter jusqu’aux torii corrompus.

Dancing Queen

Mais que nous raconte Kunitsu-Gami: Path of the Goddess ? Et bien pas grand-chose, car le jeu ne contient quasiment aucun dialogue. Une petite présentation narrée me permet de réviser les kanji avec ses furigana, c’est sympa, mais ce sera la seule explication de tout le jeu. On incarne un samouraï coloré du nom de Soh dont le but est d’accompagner la miko Yoshiro en bas de la montagne. L’un des buts des miko est de pratiquer une purification sacrée à l’aide de la danse kagura. En se renseignant un peu sur le lore, on comprend que cette danse est issue de la légende de Ame-no-Uzume qui a dansé pour faire sortir de sa grotte Amaterasu, la déesse du soleil, mais aussi good doggo dans le jeu Ōkami, la boucle est bouclée.

Problème pour notre miko, les torii par lesquels elle doit passer sont tous corrompus et fournissent un lot non négligeable d’esprits maléfiques inspirés des yokai qui pourrissent les villages aux alentours et emprisonnent les villageois dans des cocons peu confortables. L’histoire ne va pas beaucoup bouger et on ne comprend pas bien pourquoi Soh et Yoshiro s’engagent dans ce bazar, étant donné qu’ils ne vont interagir que par des salutations sommaires. Mais ce n’est pas vraiment le but de la manœuvre.

Le héros affronte les démons

Soh utilise son katana de façon chorégraphiée pour affronter les monstres surgissant par vagues des torii.

Quand je dis que Soh doit accompagner Yoshiro, c’est vraiment le cas. Soh doit tracer la route menant au torii dans chaque niveau. Pendant le jour, Yoshiro suivra cette route en réalisant une danse rituelle largement inspirée du kagura, danse complexe et transcendantale visant à purifier les environs. Cette danse n’est pas que du folklore, mais plutôt une tradition qui existe encore aujourd’hui dans certaines régions du Japon. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le kagura est mis à l’honneur dans des jeux vidéo, puisque la danse de Yuna de Final Fantasy X s’inspirait aussi largement de cette danse rituelle lors de ses cérémonies.

Cette danse, aussi utile soit-elle, est cependant très lente, si bien qu’il faut compter souvent plusieurs jours pour que Yoshiro atteigne le torii à purifier. Si le jour est totalement sûr, la nuit l’est beaucoup moins et c’est le moment où les torii corrompus vont déverser des armées de monstres malintentionnés, laissant la miko vulnérable. C’est le moment où notre héros entre en action, armé de son katana, d’accessoires variés et de pouvoirs spéciaux (les Tsuba). Mais il ne sera pas seul dans sa quête.

Pôle Emploi no jutsu

Soh sait tout de même très bien se battre. Les combos sont assez simples à base d’attaques légères et de finisher en attaque lourde, mais ils sont aussi bien chorégraphiés. C’est le premier aspect du jeu auquel on pouvait s’attendre, un aspect beat’em up qu’on reconnaît bien chez Capcom (Devil May Cry par exemple). Une fois la jauge de spécial remplie, on peut déclencher une grosse attaque avec des Tsuba qu’on débloque en explorant ou en accomplissant certains défis une fois le niveau terminé. Des accessoires variés obtenus de la même façon renforcent le héros ainsi que les villageois.

Lors de la danse de Yoshiro, Soh est bien occupé car il doit amasser des cristaux, lui permettant de continuer à tracer la route jusqu’au torii, ce qui confère au jeu un second aspect d’exploration. On va retrouver ces cristaux en parcourant la map, en purifiant des lieux de corruption, en cassant des jarres ou en aidant des animaux. En plus de ce balisage de la route, Soh peut aider des villageois emprisonnés dans des cocons.

Les villageois s'organisent pour affronter les monstres

Il faudra placer judicieusement les villageois pour intercepter l’avancée des monstres.

Ces villageois sont fragiles mais deviennent très utiles en échange de ces fameux cristaux, puisqu’ils peuvent être dépensés pour leur attribuer des rôles afin de combattre les monstres et défendre la miko. Un villageois peut devenir bûcheron, unité légère pouvant poursuivre les ennemis, ou alors canonnier, unité lente et lourde, mais avec une énorme puissance de feu, ou bien encore sumo pour attirer les ennemis. Ce sont douze rôles à débloquer qui vont constituer la petite armée personnelle de défense de Yoshiro. Et c’est là qu’intervient le troisième aspect de Kunitsu-Gami: Path of the Goddess, plus étonnant cette fois, car on retrouve des mécanismes de tower defense teintés de gestion à la Pikmin. En effet, Soh peut placer les membres de son armée de villageois à des endroits clés du niveau pour interrompre l’hémorragie d’ennemis survenant pendant la nuit. Un charpentier nous accompagne aussi sur charque niveau et prendra un peu de temps lors du jour pour construire des barrières ou des pièges. Ces villageois sont d’autant plus utiles que si Soh vient à mourir, il se transforme en esprit pendant quelque temps et ne peut que donner des ordres à sa petite armée. Il faut alors optimiser son parcours le jour pour explorer, reconstruire et recruter avant de se préparer à la bagarre à la nuit tombée.

Il y a donc un enjeu d’exploration le jour, de combat la nuit et de gestion/tower defense sur le jour entier. C’est un mix étonnant, jamais vu à ma connaissance qui donne un cachet complètement inédit pour le dernier-né de Capcom. Et ça ne s’arrête pas là ! Une fois le torii purifié, il faut reconstruire le lieu. Et ces villageois sont décidément motivés car il sera possible de les affecter aux diverses reconstructions, moyennant un peu de temps sous la forme de niveaux passés. D’ailleurs, une fois un niveau terminé, on débloque trois objectifs dans ce niveau qui débloquent de bons objets d’amélioration. J’ai beaucoup aimé remplir ces objectifs car il a fallu réfléchir à modifier mon armée de villageois et ne pas être avare en Musubi, monnaie utilisée pour améliorer les différents rôles ainsi que les capacités de Soh. Bien que les genres soient mélangés, il ne faut donc négliger aucun de ces aspects et chaque couche de gameplay est récompensante et apporte des récompenses intéressantes pour la progression.

l'arbre de talents de Soh

Les Musubi aident à améliorer le héros. Il est plaisant de constater que les remises à zéro sont gratuites, c’est aussi le cas pour les améliorations des villageois !

Umami

Avec un tel mélange de genres, il n’était pas étonnant que je ne comprenne pas la bande-annonce de Kunitsu-Gami: Path of the Goddess. C’est sans compter une direction artistique plutôt soignée, à commencer par une UX agréable, ce qui pouvait vraiment être casse-gueule de prime abord au vu du mélange des genres. Les menus sont jolis, les contrôles deviennent vite intuitifs, la caméra peut être zoomée ou dézoomée, l’IA des villageois est correcte. Ce sont autant de choses qui font déjà de ce jeu une expérience très plaisante. Ceci est sublimé par cette fameuse DA qui peut aller dans le psychédélique parfois car on remarque vite que le kagura ne concerne pas que la chamane Yoshiro, mais aussi les villageois. En effet sur leur temps libre, tout le monde danse et c’est assez sympa à regarder si bien que même le torii se fait purifier en suivant le rythme de la chamane.

Vu le contexte de japon féodal, on peut alors s’attendre à de la musique bien traditionnelle. Même si c’est souvent vrai, le batteur-compositeur Chikara Aoshima s’est bien amusé avec les taïko et autre shakuhachi, désignant respectivement les tambours et flûtes traditionnels. Il apporte néanmoins un peu de modernité avec des synthé discrets et même un peu de guitare électrique lors de combats contre les boss. L’ambiance sonore est vraiment bien travaillée dans sa globalité, on stresse vraiment quand la nuit commence à tomber et qu’on entend les monstres littéralement taper à la porte du torii. Les cris de Yoshiro nous suppliant de l’aider quand un arrive de trop près glacent le sang et les impacts visuels de l’apparition de certains ennemis sont très immersifs.

Un tableau représentant la miko

De très jolis emaki peuvent être collectionnés en accomplissant des objectifs secondaires ou en reconstruisant les villages. C’est le cas aussi de descriptions des personnages et monstres du jeu.

La direction artistique soutient joliment ce mélange de gameplay au cours de la vingtaine de niveaux de Kunitsu-Gami: Path of the Goddess. Bien qu’on entre vite dans une routine exploration/bagarre/reconstruction, les niveaux savent se renouveler à une ou deux exceptions près. Les objectifs bonus apportent une touche de replay value non négligeable et un new game plus intéressant apporte une durée de vie raisonnable. La difficulté est plutôt bien équilibrée, on ne se retrouve jamais bloqué, il n’y a pas besoin de farmer les Musubi pour renforcer nos troupes, même s’il faut quand même bien explorer et ne pas oublier de reconstruire les villages. Cette routine s’arrête au bon moment, au bout d’une quinzaine d’heures en ligne droite et deux fois plus si on se concentre sur les objectifs annexes. C’est la bonne durée pour un jeu de ce type. J’ai en tout cas beaucoup aimé ce voyage et je loue la prise de risque de Capcom de sortir un jeu aussi étonnant que rafraichissant.

On a aimé :

  • Le mélange des genres
  • La direction artistique entre psychédélique et Japon traditionnel
  • Les objectifs bonus utiles
  • La clarté du jeu, sans bugs

On aime moins :

  • Peut-être une certaine routine au bout d’un moment

Montrez le chemin si :

  • Vous aimez le Japon traditionnel, surtout quand la magie s’y invite
  • Vous cherchez un nouveau style de jeu hybride, mais qui fonctionne

Ne vous lancez pas dans la danse si :

  • Vous avez peur du noir et de la nuit
  • Vous recherchez une histoire dense et sophistiquée
Kunitsu-Gami: Path of the Goddess
Développé et édité par CAPCOM
Actuellement disponible sur PS4/5, Xbox One, Xbox Series X/S et PC(Steam)
À partir de 49,99€
Test réalisé sur PS5 grâce à une version fournie par l’éditeur

Un équilibre de saveurs

Il y a de tout dans Kunitsu-Gami: Path of the Goddess et on pouvait avoir peur que le résultat soit indigeste. Au final, c’est tout le contraire. Les mécaniques de jeu sont équilibrées, sublimées par une superbe DA. Il en résulte un cocktail très plaisant et original qui fera certainement partie des jeux à retenir cette année.

9
Note finale:
9

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