Une combinaison noire moulante, des talons (très) hauts, un déhanché qui ferait pâlir Beyoncé et consorts, des lunettes pour faire sérieuse, une propension à botter des culs, une panoplie d’accessoires à n’en plus finir… Va-t-on parler sadomasochisme et dominatrice ? Nope, bien que l’attente ultra longue entre la parution des deux volets de la franchise Bayonetta puisse s’apparenter à une forme de torture par la privation. C’est donc bien au retour de notre sorcière de l’Umbra adorée que l’on va s’intéresser aujourd’hui. Alors, retour réussi ou pétard mouillé ?
Bayonetta, premier du nom, s’est imposé comme un incontournable des beat’em up et a même servi à établir la réputation du studio Platinum Games que l’on connaît à présent. Malheureusement, son succès commercial fut bien plus mitigé, ce qui compromit la sortie d’une suite attendue par beaucoup de fans (dont yours truly). Grâce à Nintendo, pourtant plus habitué aux univers colorés et mignons à la Kirby et Mario, l’heure est enfin venue de fouler à nouveau le sol de la Trinité des Réalités !
Bayonintendo
Exclue Wii U, Bayonetta 2 se devait d’emprunter les spécificités de la console pour justifier le deal. De ce côté, on peut dire que c’est réussi sans être indispensable. En effet, le jeu au Gamepad se révèle bien réalisé mais sans intérêt pour les joueurs cherchant le défi puisque les combos s’enchaînent automatiquement, l’expérience se limitant à tracer un trait sur l’écran pour esquiver et à appuyer sur les ennemis pour que Cereza fasse pleuvoir les coups punitifs, mue par une intelligence artificielle qui, on doit bien l’avouer, est grandement améliorée par rapport au mode facile sur le premier volet. En dehors de ça, le Gamepad affiche le même écran que votre téléviseur, tout comme New Super Mario Bros U en son temps, ce qui permet simplement de jouer pendant que votre conjoint regarde Harry Potter (du vécu ? Un peu, ce week-end…) mais n’apporte pas vraiment de plus-value au titre.
La collaboration avec Nintendo permet toutefois des ajouts appréciables pour nous autres gamers à l’intérieur même du jeu. Vous avez sans doute entendu parler de la possibilité de déguiser Bayonetta en Link, le héros de la saga Zelda. Eh bien, il existe plusieurs tenues spéciales comme celle-ci (dont un costume de Samus Aran qui apporte son propre canon) que vous pourrez vous procurer dans le bar de Rodin, The Gates of Hell, contre les fameux halos, monnaie iconique de la série. Il vous en coûtera 100 000 halos pour chaque miroir à thème (thème Nintendo, thème Geisha, thème ecchi, etc) plus 100 000 autres halos pour chaque balle qui débloque un costume spécifique. De plus, lorsque vous finirez Bayonetta 2 en mode 3e apothéose (3rd climax, soit le mode difficile), vous débloquerez une arme spéciale tirée d’une licence très très connue de la firme nipponne. Un indice ? Disons qu’un chien, même enchaîné et rondouillard, est capable de mâcher avec beaucoup de force (Get it?). Voilà pour ce qu’apporte l’exclusivité Nintendo.
Le tartare à la sauce Bayo
Ok, tout ça est bien gentil, amusant et tout ce qu’on veut mais ce qu’on attend d’un Bayonetta, c’est surtout du gameplay et un sens du gigantisme qui fout le vertige. Sur ce plan, Platinum Games nous a bien servis ! Au travers d’une histoire à peine plus intéressante (et intelligible) que celle du premier opus, Bayonetta 2 nous propose un gameplay proche de celui de son aîné après avoir pris soin d’en gommer la quasi-totalité des défauts. Les combos sont plus fluides, encore plus impressionnants (si si, je vous assure, ils ont réussi), plus nombreux, plus divers, les invocations toujours plus improbables et l’ajout d’une nouvelle fonctionnalité permet un renouveau appréciable. Cette nouveauté, c’est l’apothéose de l’Umbra. Pour la déclencher, il vous faudra utiliser des orbes magiques, celles-là même qui servent à punir vos adversaires au travers des attaques sadiques. Si vous faites le choix de déclencher l’apothéose de l’Umbra, donc, toutes vos attaques verront leur puissance se décupler, tout comme leur portée, puisque chaque coup sera en fait l’équivalent d’un finish de combo, puis un finish de combo en mode apothéose de l’Umbra correspondra en fait à une invocation. Autant vous dire qu’en début de jeu, cette feature vous donnera l’impression d’être intouchable (et ce n’est pas entièrement faux puisque la puissance déployée par ces attaques a tendance à plaquer les ennemis, même les boss, les empêchant de vous attaquer tant que vous les martelez). Comme pour le premier opus, ces combos nécessitent de l’entraînement (il ne suffit pas d’appuyer sur n’importe quel bouton… Oui bon ok, laissez moi faire des blagues pourries avec la bannière de l’article s’il vous plait) et la courbe d’apprentissage du jeu est très bien étudiée pour qu’un joueur pas spécialement porté sur les beat’em up ne soit pas frustré en mode 2e apothéose (2nd climax, mode normal). Par contre, autant vous prévenir, le gap de difficulté entre le 2nd et le 3rd climax est plus violent que ce à quoi je m’attendais (mais heureusement car le 2nd est définitivement trop simple à mon goût) et je crains de découvrir ce qui m’attend pour le mode apothéose infinie (non-stop climax, mode super hard) ! En parlant de ça, le changement sur le witch time (ce bullet time provoqué par une esquive bien timée et qui n’est pas présent dans le mode non-stop climax) est le seul point que je ne comprends pas puisque le jeu semble vouloir s’adresser à un public moins expert et le temps de cette feature a été raccourci. Cela me semble aller à l’encontre d’une démarche de simplification des premiers modes de difficulté. Reste que, pour les joueurs habitués, c’est une difficulté bienvenue.
Exit également la relative redondance du classique de la old-gen, tant au niveau des combats que des décors. L’histoire de Bayonetta 2, si simple soit-elle, a le mérite de corriger ce défaut. Jeanne, maintenant amie avec Cereza, voit son âme se faire dérober par une invocation rebelle de Bayonetta lors d’un combat du prologue, ce qui oblige notre héroïne à se rendre en Inferno (l’enfer de la Trinité des Réalités) pour récupérer ladite âme avant que son temps ne soit écoulé et que Jeanne ne soit perdue à jamais. Pas très original me direz-vous, et vous aurez raison. Oui mais voilà, ce prétexte donne l’occasion à Platinum Games de nous emmener en Inferno, justement, permettant ainsi de nous montrer des décors sublimement chaotiques peuplés de toutes nouvelles contributions au bestiaire. Chaque ennemi ayant ses particularités et ceux-ci étant bien plus nombreux dans ce volet, on a donc droit à des combats à chaque fois différents mais toujours épiques, sanglants et esthétiquement impressionnants. Evidemment, vous devrez aussi occire bon nombre d’anges (dont vos préférés du jeu précédent) et cela sera possible grâce à l’autre partie du scénario dans laquelle un petit garçon mystérieux nommé Loki se lie à Cereza et traîne tout un lot de bagages assez importants pour foutre la merde et menacer l’humanité d’extinction, voire pire. Mais je ne vous en dis pas plus car, si l’histoire est simple, elle va puiser dans les poncifs des shonen et autres histoires de la pop culture et j’ai l’impression que vous êtes le public à qui ça pourrait plaire (comme moi). Et puis les réparties cinglantes de la sorcière et de Rodin sont évidemment de la partie, tout comme les bouffonneries (assez énervantes en ce qui me concerne) de l’ami Luka.
On ajoute et on retire : un jeu, c’est comme de la cuisine
L’équipe de Platinum Games, pour rendre son jeu moins punitif, a décidé de se séparer des QTE éclairs décriés du premier opus, ainsi que d’une grande partie des passages de plates-formes mortels et de poursuites. Il semblerait que nombre de joueurs n’ait pas goûté cette difficulté qu’ils estimaient superfétatoire. Soit. Après tout, le jeu gagne en rythme, ce n’est pas plus mal. Le choix de retirer le stand de tir aux anges en fin de chapitre me paraît par contre quelque peu dommageable puisque cette partie, qui coupait également les temps de chargement, permettait aux doigts de se décrisper et apportait un côté foire assez sympa à mon avis. Côté ajouts, on a droit à plusieurs combats aériens ainsi qu’à des phases sous-marines. Les combats aériens rendent l’appréciation des distances moins aisée et referment l’éventail des possibilités en impliquant souvent d’obliger Cereza à parcourir encore et encore des distances (petites, certes, mais tout de même) afin de frapper au corps à corps, ce qui aura tendance à saouler et à faire adopter les attaques à distances, moins impressionnantes et moins marrantes, mais qui souffrent moins de ces interruptions. Toutefois, ils ajoutent au sens de gigantisme du jeu et donnent lieu à des affrontements parmi les plus mémorables du titre. Quant aux phases sous-marines et à la nouvelle forme de serpent qui permet de s’y déplacer plus rapidement et plus librement, elles sont relativement dispensables et s’avèrent moins agréables que les phases classiques du fait d’une maniabilité correcte mais moins naturelle. Ce qui n’a pas changé, par contre, c’est l’ambiance psychédélique apportée notamment par la BO acidulée, empruntant en partie à la J-Pop son sens de la gaieté décomplexée en toutes circonstances. Certaines choses ne changent pas et ce n’est pas plus mal.
Du contenu oui, du DLC non
Bayonetta 2 est un jeu dont le scénario est relativement court. Tout comme son prédécesseur, votre premier run en mode normal devrait vous prendre entre 8 et 10h selon votre aisance à défourailler du méchant (personnellement, j’ai mis 8h avec un peu d’exploration et sans passer les vidéos. Mon 2e run, en mode 3rd climax, a été bien plus court puisque j’ai foncé tout droit et passé toutes les cutscenes). Cette fois encore, la durée de vie du jeu est fortement augmentée par les armes et objets à récupérer. A vous les Disques d’or (Golden LPs) brisés et disséminés dans les 16 chapitres de l’histoire qui vous donneront accès à de nouvelles armes. A vous le scoring et les défis de Muspelheim (des défis cachés dans les versets du scénario où il vous faudra combattre sous certaines conditions comme ne pas se faire toucher ou ne causer de dégâts qu’avec les armes ennemies). A vous les défis des sorcières, ces chapitres oubliés où vous devrez affronter des vagues d’ennemis de plus en plus féroces pour démontrer votre habileté. A vous, aussi, la possibilité d’acheter des costumes différents pour votre personnage, comme on en a parlé dans la partie Bayonintendo. Vous pourrez également tenter d’acheter le ticket Platine qui, cette fois, voit son prix grimper en flèche puisqu’il passe de 999 999 halos dans le premier opus à 9 999 999 halos ! Par contre, vous le verrez disponible dès la fin de votre premier run au lieu de devoir amasser 10 millions d’halos comme précédemment. Mais bon, si vous avez déjà autant d’halos à la fin de votre première partie, c’est que vous avez salement triché (et je veux bien savoir comment). Ce ticket vous permettra d’affronter Rodin et de débloquer ainsi l’arme Rodin, tout comme dans le premier jeu (je ne sais pas si l’arme est exactement la même, je n’ai pas encore réuni assez d’halos pour l’achat du ticket). Vous pourrez également jouer avec Jeanne (qui a échangé la longueur de ses cheveux avec Cereza dans ce titre) dès la fin de votre premier run. Ce sera donc bien plus facile cette fois.
Cereza ne pêche pas en ligne
Et c’est pas fini (pardon) ! Là où Bayonetta ne comptait que sur son contenu solo pour la rejouabilité, son successeur s’offre un mode coopération très sympa, baptisé Double apothéose (ou Tag Climax), dans lequel vous devrez affronter des ennemis dans 6 arènes successives et où le but sera de marquer plus de points que votre adversaire/coéquipier. Pour ce faire, vous devrez commencer par récupérer des cartes de versets que vous trouverez dans la campagne solo (simplement en vous battant contre les monstres) et qui vous permettront d’affronter l’ennemi correspondant à chacune de ces acquisitions dans le mode double apothéose. Lorsque vous choisirez une carte (donc un ennemi), vous aurez la possibilité de parier sur le combat pour que le vainqueur remporte encore plus d’halos. Mais attention, un pari plus élevé augmentera également la difficulté du combat en rendant votre ennemi plus puissant, plus résistant, et parfois plus rapide. Ne soyez donc pas trop gourmand si vous débutez dans le jeu et restez dans les petits niveaux (vous avez le choix entre 4 niveaux : un sans pari, puis 3 avec). Si vous gagnez la manche, ce sera à vous de décider du prochain adversaire ainsi que du pari. Ces joutes à deux sorcières de front auraient pu donner un bordel monstre aux vues des démonstrations de force auxquelles on a pris goût dans le jeu, mais le tout se révèle étonnamment fluide et clair. Dommage que ce mode coopératif ne soit disponible qu’en ligne et pas en local. Pas grave, je me suis bien amusé à ridiculiser mes concurrents. Surtout qu’il ne souffre d’aucun lag et que je n’ai pas eu trop de difficultés à trouver des joueurs à qui me mesurer grâce au système de matchmaking automatique du soft.
Je veux une femme like Wii U
Vous le savez, la licence Bayonetta est souvent critiquée parce qu’elle est considérée comme sexiste par certain(e)s. On ne peut nier qu’elle joue sur les clichés d’une femme hyper-sexualisée qui se dénude de plus en plus à mesure que ses attaques gagnent en puissance et que nombre de joueurs (et joueuses) sont ravis d’admirer la sulfureuse sorcière de l’Umbra dont le rendu graphique est plus beau que jamais. Le jeu est d’ailleurs globalement magnifique, exception faite de quelques décors un peu moins travaillés et de l’apparition inopinée d’aliasing inexplicable à certains moments (mais vu la constance du framerate à 60fps, franchement, on ne peut pas se plaindre de quoi que ce soit). Pour en revenir aux accusations de sexisme, il me semble aberrant de faire ce procès à Bayonetta. Certes, le personnage est sexy et souvent partiellement dénudé, faisant régulièrement référence à la culture ecchi, mais ne semble-t-elle pas consciente de ça ? N’en joue-t-elle pas ? N’est-elle pas un personnage fort à qui personne ne peut rien imposer ? Si, elle est tout ça. Alors oui, cette licence a été développée principalement par des hommes. Est-ce à dire que tous les hommes qui veulent raconter les aventures d’une femme sexy sont sexistes ? Je ne le pense pas. Pour moi, elle s’apparente plus aux personnages féminins de Joss Whedon, badass, compétentes et sûres d’elles qu’à un trope de victime perpétuelle qui rassure le supposé homme macho en flattant son ego et en lui rappelant qu’il doit être là pour protéger l’être fragile. Cette fois, c’est Peach qui prend d’assaut le château (presque littéralement puisque vous pouvez vous procurer le costume de Peach dans le jeu) et elle le fait à grands renforts de coups dévastateurs !
TL ; DR
Bayonetta 2 prend la recette du succès de son prédécesseur et la sublime en parfaisant son gameplay, en étoffant son bestiaire, en variant les environnements et en accentuant toujours plus le côté épique des batailles sanglantes auxquelles le joueur prend parti. Ce nouvel opus est une réussite qui, si elle ne dépayse pas le joueur, lui offre l’expérience dont il rêvait probablement depuis près de 5 ans. Quelques nouveautés dans le gameplay – dont l’apothéose de l’Umbra, le nouveau pouvoir très puissant de Cereza – et un mode coopération en ligne bienvenue font de ce jeu un must have pour tout amateur de beat’em up, et plus généralement pour tout gamer (ou presque) sans laisser de côté les nouveaux venus qui voudraient se frotter au genre.
On aime :
- La réalisation soignée
- Le rythme maîtrisé
- La maniabilité irréprochable
- Les affrontements épiques et orgasmiques
- Les combos
- Le bestiaire presque surpeuplé
- Le mode Double apothéose (coopération en ligne)
- La foultitude d’items à débloquer
- La BO acidulée
- Les décors variés
- Les clins d’œil au premier opus
On aime moins :
- Les combats aériens
- Les phases sous-marines dispensables
FRAKIN' EPIC !!!
Action frénétique, attaques dévastatrices, ennemis incroyablement impressionnants, cette nouvelle itération de la franchise Bayonetta devrait combler tout fan de son prédécesseur et en agripper de nouveaux grâce, notamment, aux efforts apportés pour ne pas perdre les novices.
3 Comments
Kyra
28 Oct 2014 2:17Le jeu tant attendu !
Eskarina
31 Oct 2014 8:18Ce clin d’œil à K-Maro, je ne sais toujours pas si ça tient du génie ou…
Gizmo
01 Nov 2014 12:01Du génie, bien sûr ! Tu me connais… Ahem