Je n’aime pas le Poker et je n’ai jamais aimé jouer au Poker. Voilà, c’est dit ! Que cela soit en ligne ou autour d’une table, mon allergie aux jeux d’argent et ma crainte de pouvoir me faire battre par une paire de 4 l’emportent toujours sur mon enthousiasme. Pourtant je suis le premier de l’équipe KMG à être tombé dans cette drogue dure qu’est Balatro. Dans ma chute j’ai entraîné tous mes camarades. Ceci est mon histoire.
L’as de trèfle qui a piqué mon cœur
Autant dire qu’avec ses 52 cartes ultra classiques et son ambiance table de casino psychédélique, ce n’était pas gagné pour que j’accroche à Balatro. Mais il est là, tous les soirs, sur l’écran de mon Steam Deck, il rit de moi lorsqu’il m’empêche de continuer une série télé et il me regarde d’un air complice lorsque la personne avec qui je vis doit se répéter une énième fois pour que je lui prête un semblant d’attention.
Cette déchéance provient probablement du fait que Balatro n’est pas un jeu de Poker ! Et si j’assume pleinement que cette phrase sonne comme « Mais non, le CBD ce n’est pas de la drogue » c’est parce que j’ai de solides arguments ! Avant toute chose, Balatro n’est pas un jeu de Poker car vous jouez seul, il n’y a ni adversaire virtuel à battre ni monstre à massacrer. Votre objectif sera simplement d’atteindre un score de plus en plus élevé, une manche après l’autre. Et il se trouve que pour gagner des points, il vous faudra combiner des cartes à la manière de mains de Poker. Si l’on omet quelques termes empruntés au Poker, la comparaison s’arrête là.
Par contre, Balatro est définitivement un Rogue Like. Oui, un Rogue Like avec des cartes, encore un. Comme souvent dans le genre, on vous demandera plutôt de réfléchir avant d’agir et votre capacité à optimiser un build sera plus mise à l’épreuve que votre dextérité manette en main. De build il est donc question puisqu’après chaque manche, vous allez obtenir quelques piécettes à dépenser en boutique. C’est là que vous pourrez influencer sur tout un tas de paramètres vous permettant de maximiser vos futures chances de réussites.
Joker : Folie à deux de pique
Les modifications les plus simples à expliquer sont celles impactant directement votre deck : changer la couleur (pique, cœur, carreau ou trèfle) ou la valeur (As, deux, trois…) de certaines cartes, remplacer une carte par la copie d’une autre carte, ajouter un multiplicateur de points à une carte, gagner quelques pièces si vous conservez une carte en main en fin de manche etc. La possibilité de pouvoir jouer tôt ou tard une main avec cinq reines de cœur est donc bien réelles. Mais votre build va pouvoir influencer bien d’autres paramètres. Il peut s’agir de la taille de votre main, des multiplicateurs appliqués à certaines combinaisons, des chances de voir apparaître des cartes rares, d’augmenter l’argent récolté après chaque manche gagnée etc. Heureusement, tout cela est introduit petit à petit, mais aujourd’hui je ne parviens plus à trouver un élément de jeu sur lequel il n’est pas possible d’influer d’une manière ou d’une autre.
Parmi tous les éléments accessibles en boutique, ce sont probablement les Jokers qui symbolisent le mieux votre capacité à tordre le jeu selon vos propres règles. Par défaut, vous pourrez en cumuler jusqu’à cinq et ils seront à la fois ce que vous chercherez à optimiser le plus et ce qui influencera le plus vos prises de décisions. Votre but : créer un moteur vous permettant d’engranger toujours plus de points. Pour peu que la chance soit avec vous, en quelques minutes vos Jokers vous feront oublier tout espoir de réaliser une quinte flush providentielle puisque n’importe quelle double paire vous rapportera à coup sûr des (dizaines de) milliers de points.
En contrepartie, le jeu aussi va vous imposer ses règles toutes les trois manches. Ces points de passage obligatoires assimilables à des boss seront surtout là pour tester la robustesse de votre build de bien des manières : en vous forçant à n’utiliser qu’un seul type de main, en vous distribuant des cartes faces cachées, en vous prenant une pièce à chaque carte jouée, en défaussant aléatoirement certaines cartes etc.
Balatro diffusion
Parties après parties, toute la richesse de Balatro se dévoile au travers d’une progression naturelle plutôt bien pensée et ponctuée d’épiphanies lorsqu’on réalise la puissance de deux Joker bien combinés. Dans un premier temps, vous débloquerez essentiellement les différents éléments pouvant apparaître in game. Petit à petit, ces nouveaux éléments se feront plus rares au profit de nombreuses petites variantes aux règles légèrement modifiées et auxquelles vous voudrez vous confronter.
Après de premières parties satisfaisantes, je me demandais si le jeu allait me plaire plus de quelques heures. Après quelques dizaines d’heures, je pense que le jeu pourrait me retenir quelques centaines d’heures. J’imagine qu’avec quelques extensions bien pensées, certains dépasseront le millier d’heure de jeu. Balatro c’est ce jeu que l’on rêve de voir intégré par défaut dans Windows, ce jeu qui peut finir dans votre barre de tâches toute la journée et ce jeu qui vous retiendra 45 minutes aux toilettes lorsqu’il sera porté sur mobile. Cependant, si vous n’avez pas autant de temps à lui consacrer, son (unique) développeur a aussi pensé à vous en ajoutant aux paramètres la possibilité de débloquer instantanément tout le contenu. On apprécie l’idée.
Balatronche du jeu, c’est pas son point fort
Si graphiquement, Balatro n’est jamais très joli, cela n’impacte jamais le plaisir de jeu. Déjà parce que le tout est toujours cohérent, mais aussi toujours très lisible. La bande-son du jeu n’est pas incroyable non plus, mais elle a le bon goût de ne jamais vous prendre la tête, ce qui n’est pas une mince affaire puisqu’on l’écoute en boucle. Au pire, vous ne perdrez pas grand-chose à écouter autre chose pendant vos parties, même si tous les petits sons qui se déclenchent lorsque vous engrangez des points sont très satisfaisants. Côté histoire, n’espérez rien : elle n’est pas plus développée que dans une partie de Solitaire.
Pour la forme, précisons tout de même que le jeu n’est aujourd’hui disponible qu’en anglais, à l’exception de la version PC pour laquelle le français et d’autres langues sont disponibles en beta. Le jeu invitant pas mal à l’expérimentation et le niveau de vocabulaire nécessaire étant plutôt réduit, cela ne devrait pas être un frein pour la plupart des curieux qui craqueront.
Après toutes ces parties de Balatro, il ne me reste qu’une question en tête. La même question que je me posais après de longues soirées passées sur 2048 ou Baba is You. La question que je me pose lorsque l’évidence est sous mes yeux. Comment se fait-il que personne n’ait inventé ce jeu plus tôt ?
On a aimé :
- Le concept
- La progression bien pensée pour les uns
- La possibilité de débloquer tout le contenu pour les autres
On a moins aimé :
- Pas toujours très beau
- Pas encore de VF officielle
- Quelques Jokers un peu inutiles en début de partie
Faites tapis si :
- Vous aimez les gros nombres
- Vous cherchez des parties rapides
Couchez-vous si :
- Vous n’aimez pas les rogue like
- Vous n’aimez pas les jeux sans histoire
All In
Balatro a éveillé en moi un plaisir que je ne connaissais pas : celui de combiner des petits chiffres entre eux pour créer des nombres gigantesques. Alors oui, le sexe c’est bien et la drogue ce n’est pas facile d’en sortir. Mais lorsque vous marquerez six millions de points en une seule main, c’est un tout nouveau sommet de plénitude qui s’offrira à vous.